Ces deux dernières années, dans le cadre du projet UHC Engage, PAI et ses partenaires de la société civile en Afrique subsaharienne et en Asie ont tout mis en œuvre pour saisir les opportunités de faire progresser la santé et les droits sexuels et reproductifs, y compris la planification familiale, à l’occasion de la réforme de la couverture sanitaire universelle. La difficulté vient du fait que les soins de santé universels présentent de multiples facettes qui sont par définition spécifiques à chaque pays. Décoder l’environnement de la réforme politique et financière de chaque pays est essentiel pour éclairer les possibilités dont dispose la société civile pour engager les décideurs politiques à accroître l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive pour toutes les personnes, en particulier pour les femmes et les filles.
Les détails des politiques émergentes au niveau national ne sont pas largement disponibles à l’échelon mondial et régional. Les fiches pays de notre série Décoder les politiques de financement des soins de santé primaires au niveau national viennent combler cette lacune fondamentale dans les connaissances.
Au Ghana, le concept de couverture sanitaire universelle ne date pas d’hier. Entre la fin des années 1970 et le début des années 2000, le ministère de la Santé a introduit d’importantes réformes politiques pour accroître l’accès à des soins de santé de qualité tout en garantissant un filet de sécurité financière à partir des frais à la charge des patients. Les objectifs de développement durable de 2015 ont procuré un regain d’énergie pour accomplir de nouveaux progrès dans la concrétisation de la couverture sanitaire universelle.
Plaidoyer en faveur de la planification familiale au Ghana
La couverture sanitaire universelle (CSU) a pour but de susciter des changements politiques et systémiques déterminants dans le monde entier en vue de garantir que tous les individus aient accès aux services de qualité dont ils ont besoin (des soins préventifs aux soins palliatifs) et bénéficient d’une protection financière qui leur évite des difficultés financières quand ils font jouer leur droit d’accès aux soins de santé. Cependant, il n’est pas facile d’avoir accès à des renseignements détaillés sur les politiques nationales émergentes aux niveaux mondial et régional. Dans le cadre du projet UHC Engage (S’engager en faveur de la CSU), PAI et ses partenaires ont collaboré à l’élaboration d’une série de publications démystifiant les politiques de financement relatives à la CSU propres à chaque pays afin d’illustrer les possibilités de plaidoyer en faveur de la planification familiale (PF) et d’alimenter le dialogue international. Puisque chaque pays se trouve à un stade différent de la réforme du financement de la CSU, ces notes déconstruisent les différents processus politiques liés à la CSU en temps réel, mettent en lumière des exemples à plusieurs facettes pour faire progresser la PF au niveau des politiques axées sur la CSU et apportent des idées dans de multiples contextes aux défenseurs de la santé et des droits sexuels et reproductifs (SDSR) pour renforcer leurs efforts au niveau mondial.
Au Ghana, Marie Stopes International Ghana (MSIG) est l’une des organisations qui plaident en faveur de politiques CSU solides qui donnent la priorité à la santé sexuelle et reproductive (SSR). MSIG s’efforce aux côtés de partenaires clés de combler une lacune importante en matière d’accès à la PF et de renforcer la base de données probantes pour les décideurs politiques qui décideront si et comment couvrir entièrement la PF dans le cadre de réformes axées sur la CSU. MSIG plaide en faveur d’une amélioration de la disponibilité, de l’accessibilité et de l’utilisation élargie des services de PF modernes, en particulier pour celles qui en ont le plus besoin mais qui sont freinées par les frais à leur charge : les personnes de faible statut socio-économique et les adolescents. La recherche a montré que le coût est un obstacle aux services de PF et le plaidoyer de MSIG pour supprimer cette limitation financière sur la SDSR des Ghanéens peut améliorer l’accès et l’utilisation de la PF.
Aperçu de la PF au Ghana
Le gouvernement ghanéen a annoncé ses premiers engagements vis-à-vis du mouvement Family Planning 2020 (FP2020) en 2012 et a depuis mené une action multisectorielle pour élargir l’accès et la disponibilité de services de PF de qualité à tous les niveaux du système de santé. En 2019, le taux de prévalence contraceptive moderne (TPCm) chez toutes les femmes est de 22,2 % et le besoin actuel non satisfait en PF est de 32,9 %. Les dirigeants gouvernementaux ont également donné la priorité à l’amélioration de l’accès des adolescents à la PF, à l’élargissement de l’éventail des méthodes contraceptives, à la mobilisation de ressources nationales et, pour la première fois, à l’inclusion de la PF dans le kit des prestations du régime national d’assurance maladie (RNAM). Toutefois, davantage de progrès sont requis pour atteindre les engagements du gouvernement en matière de PF. Les produits de PF sont gratuits dans les établissements du secteur public, mais pour recevoir la méthode contraceptive de leur choix, les femmes et les filles doivent encore payer de leur poche la prestation de service. Le Fonds national d’assurance maladie finance des services de santé maternelle gratuits mais, bien que la loi révisée de 2012 sur l’assurance maladie nationale établisse une disposition légale pour que le Fonds finance également la PF, les décideurs politiques n’ont pas encore donné suite aux changements de politique requis.
Au Ghana, la PF est financée par le gouvernement, les dépenses à charge du patient, les sources privées et les bailleurs internationaux. En 2017, le gouvernement ne finançait directement qu’un quart de l’ensemble des produits de PF, l’objectif étant d’en couvrir un tiers d’ici 2020. Ce financement provient d’une ligne budgétaire consacrée aux produits de santé essentiels qui inclut les contraceptifs, mais le montant est insuffisant pour répondre aux besoins en PF. Ainsi, l’approvisionnement en produits de PF du Ghana dépend fortement des bailleurs internationaux, notamment de l’Agence américaine pour le Développement international et du ministère britannique du Développement international.
Après avoir initialement exclu la PF de son RNAM phare il y a 16 ans, le Ghana pilote actuellement le remboursement de la PF dans sept districts afin de catalyser les progrès vers une CSU. Ce programme pilote est l’aboutissement d’années de plaidoyer et représente une occasion longtemps attendue pour intégrer la PF dans un kit de prestations RNAM récemment rouvert. L’inclusion de la PF dans le kit des prestations permettrait aux produits et services de PF d’être financés par le Fonds national d’assurance maladie, en plus de la ligne budgétaire consacrée existante. Cela atténuerait les barrières financières liées aux dépenses à charge du patient pour les femmes qui ont accès à la PF par l’intermédiaire du secteur public, et permettrait au gouvernement d’augmenter son financement national de la PF et de réduire la dépendance vis-à-vis des bailleurs.
L’engagement du Ghana en faveur de la CSU
La CSU n’est pas un concept nouveau au Ghana. Entre la fin des années 1970 et le début des années 2000, le ministère de la Santé (MS) a introduit d’importantes réformes politiques pour accroître l’accès à des soins de santé de qualité tout en garantissant un filet de sécurité financier sur la base des dépenses à charge du patient. Ces réformes vont d’une stratégie de soins de santé primaires (SSP) et du programme de planification et de services de santé communautaires au RNAM en 2003. Depuis lors, la stratégie CSU du Ghana a évolué pour donner la priorité au comblement des lacunes en matière d’offre de services de qualité et de protection contre les risques financiers. Les objectifs de développement durable de 2015 ont apporté aux décideurs politiques un regain d’énergie pour unir des programmes hétérogènes axés sur la CSU et réaliser de nouveaux progrès dans ce domaine.